Hiver 65 — extrait de Basketball Diaries

Ces temps-ci, j’ai traîné dans ce quartier maussade, avec tous les autres camés du coin, dans un endroit qu’on appelle le « Quartier Général », en fait, c’est l’appartement de deux amis à moi, Brian et John Browning. C’est un endroit incroyable, où il y a en général entre dix et trente mecs du coin secoués par les fous rires déments des fumeurs d’herbe, ou bien en train de piquer du nez à cause de la poudre. J’y vis de temps en temps quand mes parents me foutent dehors, et, aujourd’hui, c’est là que je me suis réveillé, après une grosse défonce au hasch hier soir. Il y avait au moins une douzaine de mecs endormis par terre quand on s’est levés pour fumer le reste du shit, en regardant les dessins animés du matin. Eddie le Crado est arrivé avec une caisse de lait et trente-six miches de pain qu’il a piquées dans cette rue au magasin Grand Union avant l’ouverture, avec Willie Appleears.
Vu que c’est censé être un secteur calme, un quartier catholique petit- bourgeois, ces caves de fournisseurs laissent encore leurs livraisons dehors devant les boutiques. Dommage qu’ils aient pas laissé un ou deux kilos de salami avec, parce qu’on a été obligés d’aller en acheter chez le traiteur ouvert toute la nuit, pour nos sandwiches du matin.
Une grande journée se prépare pour nous (Brian et moi), on va monter jusqu’à la 168e Rue se procurer un peu de codéine, suffisamment pour pouvoir piquer du nez tranquilles pendant tout ce dimanche après-midi. (…)

Jim Carroll

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